jeudi 5 janvier 2012

L'autorité de l'Armée syrienne libre en question

Les menaces de reprise de l'offensive brandies par l'Armée syrienne libre (ASL) quelques jours après un appel à la trêve resté lettre morte ont renforcé les doutes quant à l'autorité de ses dirigeants sur les rebelles.
Le colonel Riad al Asaad, chef de file de l'ASL, a promis cette semaine une reprise des hostilités en réponse à la poursuite d'une répression que les observateurs de la Ligue arabe ne parviennent pas à enrayer.
Quelques jours plus tôt, il avait ordonné un arrêt des opérations militaires, le temps que ces observateurs accomplissent leur mission. Neuf soldats syriens ont toutefois trouvé la mort dans des opérations menées par des déserteurs sensés être sous ses ordres.
Selon certains commentateurs, le colonel Asaad, qui se trouve en Turquie, est plus une figure de proue que le véritable commandant en chef de l'ASL. Il revendique plus de 15.000 hommes, qui auraient rompu les rangs de l'armée syrienne, mais les effectifs exacts et les moyens des rebelles restent un mystère.
"Je ne suis pas certain de l'autorité de l'ASL sur les activistes en Syrie. La plupart de ces groupes agissent de façon autonome sur une base locale", avance Julien Barnes-Dacey, un expert britannique de la Syrie.
Les opérations armées ont éclipsé les manifestations pacifiques qui se déroulent depuis la mi-mars et les autorités syriennes y voient une preuve de leur version des faits, qui repose sur l'implication de combattants islamistes soutenus par des puissances étrangères.
Depuis novembre, les rebelles ont tendu des embuscades à plusieurs convois militaires. Ils se sont attaqués à une base aérienne et à des points de contrôle. Ils s'en sont même pris à un centre des services de renseignement et à une antenne du parti Baas au pouvoir en plein coeur de Damas.
APPELS À LA RETENUE
"Si nous avons le sentiment que les observateurs ne sont toujours pas sérieux dans les prochains jours, au plus tard dans une semaine, nous prendrons une décision qui surprendra le régime et le monde entier. Ce qui semble le plus probable à présent, c'est une vaste escalade dans nos opérations", affirmait mardi le colonel Asaad dans un entretien accordé à Reuters.
Ses menaces ont éveillé la crainte d'une guerre civile. Bourhan Ghalioun, chef de file du Conseil national syrien mis sur pied par l'opposition, a ainsi invité rebelles et déserteurs à se limiter à la défense des civils qui manifestent contre le régime. Il est "fondamental pour le succès de la révolution de préserver son caractère pacifique", a-t-il souligné.
Le décalage entre les ailes politique et militaire du soulèvement est identique à celui qui sépare une opposition en exil à la recherche d'appuis internationaux et des rebelles qui se battent en Syrie de façon quasi autonome, disent les experts.
"Je ne crois pas que le Conseil national syrien ait beaucoup d'influence sur l'Armée syrienne libre et je ne pense pas non plus que l'Armée syrienne libre ait une grande influence sur ce qui se passe sur le terrain", dit Peter Harling, de l'International Crisis Group, qui a vécu plusieurs années à Damas.
"On voit une source de légitimité dans le label ASL, mais ce sont des groupes qui émergent au niveau local, essentiellement formés de civils auxquels se joignent des déserteurs, il s'agit d'une dynamique locale plutôt que nationale", insiste-t-il.
Ces divergences sont l'une des raisons pour lesquelles les puissances occidentales, qui ont immédiatement volé au secours des insurgés libyens, restent prudentes à l'égard de l'opposition syrienne et de l'Armée syrienne libre.
Les appels à la retenue de Bourhan Ghalioun trouvent de plus en plus de détracteurs, favorables à l'option militaire, y compris au sein du Conseil national syrien.
Ses propos, a déclaré le commandant Maher al Naïmi, porte-parole de l'ASL, révèlent sa méconnaissance "de la base militaire du régime".

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