Le gouvernement présentera son projet de réforme de la protection sociale comprenant un volet sur la TVA dès février en dépit de l'opposition des syndicats, de la gauche et de l'opinion publique, a confirmé jeudi François Fillon.
L'exécutif entend montrer qu'il garde la main sur le calendrier des réformes à moins de quatre mois du premier tour de l'élection présidentielle et alors que la dégradation de la conjoncture impose de trouver des recettes pour assurer les objectifs de Paris en matière de réduction de déficits.
"Nous ne devons nous interdire aucun débat, nous avons besoin d'entendre les arguments des partenaires sociaux mais notre but est clair: notre fiscalité doit favoriser la création d'emplois productifs sur notre territoire", a plaidé le Premier ministre lors d'un discours prononcé à l'occasion du colloque "Nouveau Monde" à Paris.
"Nous discuterons de tous ces sujets le 18 janvier (date du "sommet social" annoncé par Nicolas Sarkozy), nous déciderons ensuite à la fin du mois de janvier", a-t-il précisé. "La réforme du financement de la protection sociale sera soumise au Parlement en février."
Plus tôt dans la matinée, la ministre du Budget Valérie Pécresse avait indiqué qu'un projet de loi de finances rectificative ("collectif budgétaire") serait présenté peu après le sommet social du 18 janvier.
Le Premier ministre n'a pas dévoilé les contours et les modalités de la réforme envisagée et a assuré que "toutes les options" étaient "ouvertes." Il a toutefois défendu la diminution des prélèvements sur le travail.
"On oppose de façon factice travail et pouvoir d'achat, production et consommation. Or, un emploi en moins, c'est du pouvoir d'achat en moins et c'est donc de la consommation en moins", a-t-il dit.
"Depuis 2000, alors que nos exportateurs sont en concurrence avec les produits allemands sur pratiquement 90% des marchés, l'Allemagne a diminué les prélèvements sur le travail de 2,3% du produit intérieur brut par rapport à la France", a-t-il ajouté.
"C'est ainsi qu'est née l'idée de TVA que certains appellent sociale, quand d'autres préfèrent le terme de TVA anti-délocalisation", a poursuivi le Premier ministre.
UN "MAUVAIS IMPÔT" POUR HOLLANDE
La mise en place d'une TVA sociale, susceptible de rapporter plusieurs dizaines de milliards d'euros à l'Etat selon les économistes, consisterait à affecter une partie du produit de la taxe sur la valeur ajoutée au financement de la protection sociale en échange d'une baisse des cotisations sociales et patronales.
"Un allègement de 30 milliards d'euros du coût du travail financé par une hausse de la TVA est possible au vu des pratiques en Europe. Cela correspondrait à une hausse de quatre points du taux principal (de 19,6% à 23,6%) et au relèvement de certains taux préférentiels (comme le taux réduit à 7%)", soulignent Pierre-Olivier Beffy et Amélie de Montchalin d'Exane BNP Paribas.
La gauche estime que ce dispositif, par définition non progressif, pénaliserait au premier chef les ménages modestes, la part des revenus consacrée à la consommation étant plus importante dans les catégories populaires.
En visite à la raffinerie Petroplus de Petit-Couronne (Seine-Maritime), François Hollande a qualifié jeudi une éventuelle taxe sociale de "mauvais impôt qui va pénaliser la croissance" et de "mauvais procédé à quelques semaines des élections".
"C'est une disposition qui pourrait être remise en cause si un autre président est élu", a-t-il ajouté. "C'est une initiative de Nicolas Sarkozy pour montrer qu'il peut encore agir. Il est trop tard".
Le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, a déclaré mercredi que le projet de TVA sociale constituait "l'arnaque la plus importante de ce début d'année."
Une enquête CSA pour le quotidien L'Humanité publiée mercredi révèle par ailleurs que 64% des Français y sont opposés.
La président du Medef Laurence Parisot a logiquement apporté jeudi son soutien au gouvernement.
"Ce que nous nous demandons sur la TVA sociale, c'est que les cotisations que paient les entreprises baissent mais aussi que les cotisations que paient les salariés baissent. Très clairement, nous demandons que le salarié voit son salaire net augmenter", a-t-elle dit à des journalistes.
Elle n'a toutefois pas souhaité dire si le Medef participerait financièrement à la formation des demandeurs d'emploi, un autre chantier évoqué par Nicolas Sarkozy lors de la présentation de ses voeux aux Français le 31 janvier et érigé en "priorité absolue."
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