Le Parlement adopte la révision des lois bioéthique, amertume des sénateurs
PARIS — Malgré l'amertume des sénateurs, le Parlement a adopté jeudi définitivement le projet de loi révisant les lois bioéthique et entériné le maintien du principe de l'interdiction, avec dérogations, de la recherche sur l'embryon et sur les cellules souches embryonnaires."Nous n'avons pas su faire évoluer notre droit avec la société française". Ce n'est pas l'opposition mais le rapporteur du texte, le sénateur UMP Alain Milon, qui s'est livré à ce réquisitoire jeudi, sorte de baroud d'honneur pour ce partisan d'une autorisation encadrée de la recherche.
Fait rarissime, il a voté contre le texte.
Le Sénat a voté par 170 voix contre 157 les conclusions de la commission mixte paritaire (CMP), déjà votées mardi par l'Assemblée, ce qui rend donc définitive l'adoption du texte révisant la loi bioéthique de 2004.
Pour résumer son état d'esprit, Muguette Dini, la présidente centriste de la commission des Affaires sociales a elle emprunté les mots de Shakespeare: "Much ado about nothing" soit, "beaucoup de bruit pour rien"...
Dans une intervention courte et cinglante, elle a expliqué qu'elle votait elle aussi contre "pour ne pas participer à ce jeu de dupes" qui fera qu'en France "la recherche sera très en retard sur d'autres pays".
Il faut dire que les parlementaires ont bien tergiversé sur la question de la recherche sur l'embryon. Le Sénat avait musclé le texte en première lecture et opté, contre le gouvernement et les députés UMP, pour une autorisation encadrée de la recherche. Ils s'étaient finalement ralliés en deuxième lecture, mais à trois voix près, à une interdiction.
"En maintenant l'anonymat du don de gamètes, en refusant le transfert d'embryon après la mort du père, en nous opposant à la gestation pour autrui, et à l'accès à l'assistance médicale à la procréation aux couples homosexuels, nous n'avons pas, à mon sens, su faire évoluer notre droit avec la société française", a donc estimé M. Milon.
Sur la recherche, "la rédaction retenue marque un recul incontestable", a-t-il poursuivi, et certains alinéas relèvent "de l'idéologie et non du droit", pointant aussi des "dérogations particulièrement ambiguës".
La secrétaire d'Etat à la Santé, Nora Berra, a répété jeudi que le texte était "équilibré" et qu'il préservait "le vivre-ensemble".
Pour François Laborde (RSDE, à majorité radicaux de gauche), le rendez-vous est "manqué". "Une partie de la majorité a finalement cédé aux injonctions gouvernementales formulées sous l'emprise des milieux religieux les plus conservateurs", a-t-elle déploré. Les députés de la majorité ont été accusés d'avoir légiféré sous influence, notamment de l'église catholique.
Jean Leonetti, le rapporteur UMP du texte à l'Assemblée, s'en était défendu encore mardi, en affirmant qu'il n'y avait "aucune compromission".
Jean-Pierre Godefroy pour le PS a dit "souscrire" aux propos de M. Milon et a fait part de son "amertume" quand Raymonde Le Texier (PS) considère le texte comme "régressif et fermé". A l'Assemblée, le PS s'est fait fort de promettre qu'il autoriserait la recherche sur l'embryon s'il revenait au pouvoir en 2012.
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